La nouvelle est spectaculaire : le Ministère marocain de l'Intérieur vient de confirmer que l'importation, la fabrication et la commercialisation de la burqa sont désormais interdites dans toutes les villes et localités du Maroc, ce qui revient quasiment à l'interdiction du port de la burqa, même si cette interdiction n'est pas expressément annoncée, du moins actuellement.
La burqa a été importée d'Afghanistan. Elle vient principalement d'Iran et d'Arabie saoudite dans la version nommée niqab, qui relève toutefois de la culture et non de la religion. Aucun texte islamique ne mentionne l'obligation du port d'une coiffe de ce type.
La burqa n'appartient nullement à la tradition marocaine. Celle-ci a plutôt tendance, dans les milieux conservateurs, à reposer sur le voile disposé sur la tête sans masquer le visage. Les Berbères portent souvent des coiffes de couleur. Les femmes de la famille royale ne portent jamais rien sur la tête, à l'instar de nombreuses femmes appartenant au courant moderniste.
Depuis plusieurs années, la burqa ou le niqab ont le vent en poupe. Mais leur port reste relativement rare.
Bandits et djihadistes
Ce n'est pas un hasard si les dispositions annoncées, qui entrent en vigueur immédiatement, ont été prises par le ministère chargé de la sécurité du Royaume. La raison de cette mesure est en effet clairement sécuritaire.
Des bandits, relève-t-on, ont à maintes reprises utilisé ce vêtement pour perpétrer leurs crimes. Sur le théâtre d'opération moyen-oriental, des terroristes djihadistes se cachent aussi de plus en plus sous ce vêtement qui ne permet pas d'identifier son porteur.
Or la mesure prise par le Ministère de l'Intérieur survient dans une phase où le soi-disant Etat islamique est acculé en Syrie et en Irak, d'où le danger accru du retour de djihadistes dans leur pays d'origine - et en l'occurrence au Maroc.
Le Maroc exemplaire
Les dispositions prises contre la burqa entrent dans le cadre des grands moyens mis en oeuvre de manière très décidée par le Royaume pour assurer la sécurité de ses habitants et des touristes. Des cellules terroristes sont démantelées sans pitié. Les services de renseignement recueillent des informations souvent décisives.
Le Maroc est dès lors reconnu comme un pays exemplaire à cet égard. En déclarant la burqa hors la loi, le Royaume montre qu'il ne met pas de limites à ses efforts sécuritaires.
Dans les 48 heures...
Certains fabricants de burqas - par exemple à Taroudant - ont été prévenus dimanche dernier, par écrit, de l’obligation de cesser de confectionner ce vêtement et de se débarrasser de leurs stocks ou de les convertir dans les 48 heures, sous peine de se voir confisquer toute la marchandise.
Les tissus servant à confectionner les burqas ont également été interdits de commercialisation, de manière à éviter que des privés n'en fabriquent.
Des précédents en Europe et en Afrique
A l'heure où, de l'Allemagne à la Bulgarie, en passant par la Suisse, de nombreux pays européens ont interdit ou pensent à interdire la burqa, pour éviter la dissimulation du visage dans l'espace public, on ne s'attendait toutefois pas à des mesures marocaines contre la burqa.
Il est vrai que plusieurs autres pays africains l'ont précédé dans cette voie, pour les mêmes raisons sécuritaires, dont le Sénégal, le Tchad, le Cameroun et le Gabon.
Réactions
Le fait que la burqa devienne hors la loi dans un pays musulman comme le Maroc suscite toutefois des réactions dans le pays. Les milieux proches des salafistes déplorent déjà cette mesure. Ils estiment par exemple qu'elle "porte atteinte aux droits des femmes à s’exprimer et s’habiller librement".
En revanche, il est probable que cette mesure, même si elle a exclusivement une origine sécuritaire, contribue à renforcer à l'étranger l'image d'un Maroc attaché aux valeurs de l'islam du juste milieu, de la modération et de la tolérance, prônées par le fois Mohammed VI.