Les travaux de construction de la plus grande station de dessalement au monde alimentée par des énergies renouvelables démarrent. Situé à une trentaine de kilomètres au sud d'Agadir, ce gigantesque projet devisé à 2,5 milliards de dirhams (environ 250 millions d'euros) est réalisé par le groupe espagnol Abengoa, à Séville.
La moitié de sa production, dont la capacité maximale sera de 275'000 m3/jour, alimentera le Grand Agadir en eau potable, tandis que l'autre moitié servira à l’irrigation des cultures de la région de Chtouka, située au sud de l'aéroport d'Agadir.
Ainsi que le montre l'illustration ci-dessus, deux prises dans l’océan amèneront l’eau dans un bassin pour la pré-traiter. Elle sera ensuite pompée vers la station de dessalement, située à 300 m de la côte et à 44 m d’altitude, dans la commune d’Inchaden, au sein du Parc national du Souss-Massa. L'alimentation en énergie sera assurée par trois lignes électriques de haute tension de 55 km à partir du poste source de Tiznit connecté à l'immense complexe solaire Noor Ouarzazate.
Sur notre carte, la station de dessalement est indiquée en rouge. Le cercle jaune montre Le Jardin aux Etoiles et le cercle bleu l'aéroport Al Massira d'Agadir. La zone agricole de Chtouka qui bénéficiera de l'eau dessalée est délimitée par le trait rouge.
La station utilisera la technologie d’osmose inverse. Le groupe Abengoa assurera également le réseau d’irrigation et de distribution de l'eau dessalée, qui nécessite un budget spécifique. Implanté au Maroc depuis 1977 et disposant de bureaux à Rabat et Casablanca, ce groupe avait été chargé, dans un premier temps, de la construction de l'usine de dessalement prévue au Cap Ghir, au nord d'Agadir.
Alors que les travaux avaient déjà commencé, ce projet a été stoppé, puis abandonné, au profit de celui d'Inchaden, deux fois plus important.
Nappe phréatique surexploitée
Les travaux devraient durer deux ans. La station de dessalement d'Inchaden est attendue avec impatience. La région de Chtouka assure, notamment, 90 % des exportations marocaines de tomates. D'où la surexploitation de la nappe phréatique via les puits qui ont été creusés et le risque d'infiltration de l'eau de mer dans cette nappe. L'agriculture de Chtouka génère 100'000 emplois. Une catastrophe économico-écologique pointe dès lors le bout de son nez.
Face aussi à l'explosion démographique de la commune urbaine d'Agadir, les pouvoirs publics ont donc réagi, dans le cadre du Plan Maroc Vert. Le financement de l'essentiel de l'investissement est assuré par la BMCE Bank of Africa. Baptisée "Sauvons Chtouka" (voir illustration ci-dessus), une opération de souscription auprès des agriculteurs concernés a par ailleurs été lancée par le ministre de l'agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts, Aziz Akhannouch, homme fort de la Région Souss Massa. Ce partenariat public-privé est une première du genre en Afrique.
Cet investissement n'empêchera pas le mètre-cube d’eau dessalée d'être facturé aux agriculteurs aux environs de 5 dh (50 centimes d'euros). L'eau en provenance du lac Youssef Ibn Tachfin, situé au sud de Chtouka, continuera d'alimenter la région en eau. L'exploitation de la nappe phréatique sera par ailleurs contrôlée.
A Dakhla aussi
Un autre projet de station de dessalement de l'eau de mer destinée à l'irrigation est en cours de préparation à 75 km au nord de Dakhla. Devisé à 1.7 milliard de dirhams (170'000 euros environ), il fonctionnera grâce à l'énergie éolienne.
Enfin, un projet est en cours de validation pour l’arrosage des golfs, grands dévoreurs d'eau, et des espaces verts du grand Agadir.