Pour construire leur habitat, les Imazighen (Berbères) utilisent depuis des millénaires le pisé et le tadelakt. La pierre figure aussi dans la palette des matériaux ancestraux naturels, même si son application est moins connue et moins utilisée que la terre crue, car plus complexe, plus chère et nécessitant davantage de savoir-faire.
Et c'est en apparence tellement plus simple de céder à la facilité de construire des maisons en brique qui défigurent des paysages demeurés jusqu'ici inviolés ! En écrivant ces mots, je pense au douar situé au-dessus de Taroudant, qui m'avait émerveillé.
La pierre de l'Atlas et de l'Anti-Atlas est un trésor dont la valeur mérite que des efforts soient accomplis pour lui redonner sa place. Les Marocains comme les étrangers la redécouvrent grâce à l'action de spécialistes attachés à leur patrimoine, comme l'architecte Salima Naji qui oeuvre de manière admirable dans le cadre d'associations locales de développement.
Cette énergique Marocaine a agi pour faire renaître l'agadir Aguelluy, à Amtoudi, sur le versant saharien de l'Anti-Atlas occidental, dont les constructions les plus anciennes pourraient être millénaires. Des murs, des porches ont été restaurés par les artisans locaux qu'elle a chargé de ces travaux. On a fait réapparaître les formes imazighen et les motifs symboliques, dont le triangle que j'ai adopté et transposé au Jardin aux Etoiles.
Cet admirable grenier collectif, perché comme aucune autre, a retrouvé vie. Tombé à l'époque à l'état de ruine effondrée, comme le chalet de la chanson il est aujourd'hui plus beau qu'avant...
La pierre sert aussi à protéger le pisé, très sensible à la pluie. C'est ainsi qu'à proximité de Marrakech, Salima Naji a doté une future maison d'hôtes de Tahannaout d'un parement de pierre sur la façade ouest (première photo). Une pratique, note-t-elle, spécialement utilisée dans le Haut-Atlas (région de la Tessaout notamment). Deuxième photo : les façades en pisé de la même maison. La reconstitution de murs de pierre contribue à l'embellissement du pays, donc à l'attractivité touristique. Il faut le dire et le redire aux Marocains. C'est un bon moyen de les motiver...
La dernière photo a été prise par Yann Arthus-Bertrand dans les environs de Tafraout. La couleur chaleureuse de la pierre se conjugue avec une belle combinaison de diverses tailles de pierres, qui s'emboîtent parfaitement les unes dans les autres.
Rendons par ailleurs à César ce qui lui appartient : lors de la construction de sa Médina d'Agadir, Coco Polizzi a privilégié la pierre, rendant ainsi un hommage éblouissant à l'artisanat marocain ancestral. La porte située à l'intérieur de la médina (première photo) est particulièrement réussie. La deuxième photo montre une allée dont la voûte et le pavé sont inspirés par l'art amazigh de la pierre. Les plans ont été réalisés par Coco Polizzi. Mais on est bien en présence d'une architecture marocaine, et non sicilienne !
Mon sentiment personnel au terme de cet aperçu du travail de la pierre dans le Sud marocain ? Je retiens l'idée qu'un jour une petite construction que j'ai déjà en tête à côté de ma plaza puisse s'inspirer de cette technique. Voyez par exemple ce qui a été réalisé (troisième photo) à la Kasbah Ennasra, entre Erfoud et Merzouga.
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