Décidément, rien ne va plus pour le PJD, le parti des islamistes modérés au pouvoir au Maroc. La justice poursuit en effet le président de la commune urbaine d'Agadir, Salah El Malouki, déjà violemment critiqué pour l'incompétence qui lui est prêtée, ainsi que cinq de ses vice-présidents, tous membres du parti à la lampe, ainsi que trois fonctionnaires. Le motif ? Dilapidation des deniers publics. Selon plusieurs médias, les malversations, découvertes de manière accablante par l'inspection du Ministère de l'intérieur, ont été confirmées par la Cour des comptes.
D'après le quotidien Al Akhbar, l’audit des comptes a révélé la monopolisation de l’exploitation des parkings par une seule et unique société depuis 2014, ainsi que l’anarchie qui règne dans le dépôt de carburant de la commune. Selon le même audit, certains fonctionnaires n'hésitaient pas à remplir, à l’œil, le réservoir de leur voiture personnelle...
Le rapport ajoute que la commune urbaine a payé les factures d’électricité de plusieurs bâtiments qui ne relèvent pas d'elle. Neuf compteurs ont ainsi consommé près de 275'000 dirhams (28'000 euros environ) en 2016 et un peu plus de 250'000 dirhams (25'000 euros) l'année suivante. De plus, Agadir a continué de payer les charges fixes de plusieurs compteurs inutilisés, mais non résiliés, pour 30'000 dirhams en 2016 et 24'000 dirhams en 2017.
L’audition des responsables mis en cause, et auquel profite jusqu'ici la présomption d'innocence, a été reportée en raison de l’état d’urgence sanitaire, qui a ralenti le fonctionnement de la justice. Salah El Malouki n'en a fait qu'à sa tête
A ces graves dysfonctionnements dans la gestion de la commune dirigée par des élus du PJD s'ajoutent d'autres accusation, qui touchent le domaine administratif. Si l'on en croit le même quotidien en langue arabe, le président de la commune (notre photo) n’en a fait qu’a sa tête et est allé jusqu’à annuler la délégation de signature accordée à neuf vice-présidents, sans en informer les services de la préfecture. Quand bon lui semblait, il s'emparait des prérogatives de ses adjoints pour prendre des décisions unilatérales.
Toujours d'après les assertions d'Al Akhbar, cela n'a pas empêché les inspecteurs du Ministère de l’intérieur de pointer du doigt certains secteurs dont la gestion avait été déléguée aux vice-présidents.
Ces faits n'ont pas empêché le maire d'Agadir de publier sur sa page Facebook un message selon lequel la commune aurait obtenu un prix de la Direction générale des communautés locales, pour la récompenser de "sa gestion administrative, financière et juridique des intérêts collectifs". Sans commentaires.
Les biens historiques vendus
Aux accusations du Ministère de l'intérieur et de la Cour des comptes s'ajoute, selon plusieurs médias, dont Le360, le reproche adressé au PJD de céder les biens historiques de la ville d'Agadir, que tous les exécutifs précédents s'étaient bien gardés de dilapider. Selon Al Akhbar, la commune compte céder le camping international d'Agadir (photo), à la mauvaise réputation et qu'il est prévu de remplacer, ainsi que la Fourrière municipale de la ville, située près du stade Adrar. L'affectation actuelle des deux terrains concernés n'a rien d'affriolant en elle-même. En revanche, ces surfaces font saliver dans la mesure où elles aiguisent les appétits de promoteurs immobiliers. Jackpot à la clé !
De vives réactions politiques ont suivi. L’Union socialiste des forces populaires (USFP), à laquelle avait appartenu l'ancien maire Tariq Kabbage, affirme qu'il n'existe aucun argument valable pour céder les biens de la ville et les mettre aux enchères. Le Parti Authenticité et modernité (PAM) dénonce une opération de "bradage de l’héritage civilisationnel et culturel de la ville".
Nombre d'opposants soulignent qu'il existe d’autres formules si l'on entend financer des projets, ce qui constitue l'argumentation du PJD. Le milieu associatif s’interroge, lui, sur les réelles motivations des décideurs de la mairie. Le PJD mouillé de tous côtés
Ces scandales gadiris à répétition, qui s'accompagnent d'autres grosses affaires ayant éclaté au plan national, surviennent alors que le premier ministre, Saâd Dine El Othmani (notre photo), est embourbé dans une affaire immobilière à Aït Melloul, dans la banlieue d'Agadir. Cette affaire éclabousse également le président par intérim de cette commune urbaine, par hasard également membre du PJD, comme son prédécesseur, démis de ses fonctions, pour d'autres magouilles, comme deux de ses coreligionnaires...
Ces faits tendraient-ils à montrer que le Parti de la justice et du développement n'appliquerait dans les faits ni les principes de justice ni ne contribuerait au développement?
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